Je ne comptais pas y aller. Ca ne pouvait pas être bien. Une chorale d'enfants était annoncée. Rien que d'imaginer un choeur accompagner Caroline Says de petit "doo doo" et autres "hou hou" devrait être assez pour décourager le fan le plus avide. “I only do this every thirty years. One time, one time only. You can tell your kids you saw Lou Reed’s Berlin.” écrivait-il avec son arrogance si charactéristique dans le communiqué de presse annonçant la tournée européenne. Cette déclaration aurait du me convaincre une fois pour toute de ne pas y aller. En plus, ce capitaliste a fixé le prix des places entre 40€ et 80€. C'est sûr je n'y vais pas! Puis, hier en repensant à ce concert j'ai réalisé que Lou avait raison. Le con. Il allait jouer Berlin dans son intégralité à 15 minutes de chez moi et il fallait que j'y sois, ne fut-ce que pour pouvoir le dire à mes enfants. On tente alors de se trouver des excuses, Julian Schnabel a fait la mise en scène, sa fille a fait des projections incroyables, si ça se trouve le bus de la chorale aura crevé un pneu... Et puis merde. J'y vais.
Je décide de donner au destin une dernière chance de m'empêcher d'y aller en me rendant à Forest National armé d'un seul billet de 20€. Après 15 minutes d'attente des fans désespérés me revendent à contre-coeur une place à 80€, dans le parterre, pour ce seul billet bleu. Je ne peux plus faire demi-tour. J'entre dans la salle qui pue déjà le hamburger, passe à côté du stand de T-Shirt à 30€, évite l'ouvreuse et trouve ma place. Ambiance parfaite pour un Rock 'N Roll Animal. Les sièges étant numérotés le couple à qui j'ai acheté la place ne tarde pas à me rejoindre. Sourires gênés. La salle est bien remplie sans toutefois afficher complet et des images d'un ruisseau sont projetées sur un grand drap blanc derrière tous les instruments. Ca a l'air plus sobre que prévu finalement. Lou Reed n'est peut-être pas encore complètement mégalo. Les lumières s'éteignent et le drap blanc se retire pour laisser place à un décor composé de draperies bourgeoises du 18e siècle avec devant-elles ce qui semble être un canapé pendu verticalement. La chorale de 15 jeunes filles est bel et bien là, en tenue de paroisse, accompagnées d'un petit orchestre de huit cordes et cuivres en smoking turquoise. Tout en subtilité ce Lou.
L'introduction de Berlin ("Ein Prosit, Ein Prosit" suivit du "Joyeux Anniversaire") retentit pendant que les musiciens trouvent leurs marques. La chorale entre en action et là surprise, elle n'est pas trop envahissante. Elle accompagne subtilement les morceaux. Berlin, Lady Day et Men of Good Fortune passent en un éclair mélodique. Arrive Caroline Says, la chorale se rassied, on ne les entendra plus jusqu'à The Bed, et Lou entre véritablement dans son concert. La suite est magnifique. On connait tous les morceaux et ces réditions live n'ont pas à pâlir devant les enregistrements. Mon voisin n'est visiblement pas du même avis puisqu'il choisit ce moment pour quitter définitivement le concert. Un amateur de Lo-Fi sûrement. Le quatuor final de Berlin, Caroline Says II, the Kids, The Bed et Sad Song cloturent ce moment en beauté. Lou avait une nouvelle fois raison, la chorale a tout à fait sa place dans ce spectacle. Pour la mise en scène de Julian Schnabel il faudra repasser par contre. A part choisir l'emplacement des musiciens, le décor et la couleur du T-Shirt de Lou peut-être on ne peut pas dire qu'il se soit foulé. Le concert est on ne peut plus statique. Les projections de Schnabel Jr sont également vite reléguées aux oubliettes. On préfère faire fit de tous les artifices qui ont en partie servi de prétexte à notre venue pour se concentrer sur la musique. Ces 50 minutes avaient tout pour déplaire. Cher, pompeux, intéressé, opportuniste, etc. Je crois que beaucoup auraient aimé pouvoir dire qu'ils n'ont pas aimé. Seulement voilà, Lou Reed s'en sort très bien.
Berlin se termine, le groupe quitte la scène pour revenir quelques minutes plus tard avec une trilogie de "crowd pleasers". Lou Reed colle à son concept, on l'aurait mal vu resortir une obscurité tirée de The Raven à ce moment-ci. Il lâche Sweet Jane, Satellite of Love et Walk on the Wild Side. Le public exulte mais c'est un peu moins réussi que la première partie. Lou se contente de chanter les mots "Sweet Jane..." et laisse sa choriste faire le reste. Satellite of Love accompagnée d'une chorale atteint comme vous pouvez l'imaginer les sommets du kitch. Lou sourit tout au long de la chanson et se plait à jouer au chef d'orchestre devant ses quinze jeunes filles. Walk on the Wild Side cloture le concert de manière très convenue mais pour rien au monde on ne serait reparti sans... Je pensais qu'il allait revenir faire Perfect Day tant qu'on y était mais c'en était visiblement trop.
And all the girls said : dou, dou dou...
On les connait tous mais ça ne fait jamais de tort...
Lou Reed - Caroline Says II
Lou Reed - The Kids
Site Officiel - Acheter "Berlin"
5 commentaires:
et la voix de lou?
passe que j'avais trouvé un bootleg d'un concert donné à NYC en déc 2006 là justement où il reprend la premiere fois Berlin
et le plus dur, ce fut la voix de Lou
urant leconcert, il faisait son âge, voix chevrotante, itou, itou... un vrai papy!
pas encore Abraham Simpson, mais pas loin...
sa voix a évidemment un peu perdu mais j'ai trouvé qu'il s'en sortait plus que bien! Je m'attendais aussi à ce que ce soit un peu catastrophique sur ce plan là, ce qui ajoutait une appréhension supplémentaire face à ce concert...
Merde alors ... "The Kid" ... Quel morceau ... Et cet album ...
A l'époque , j'étais jeune et j'avais lu "mémoires d'un enfant du rock " , de philippe Manoeuvre . Je sais, ça peut faire rire , n'empêche qu'avant de se lancer dans l'ouverture de crèches rock - bobos sur Paris, Manoeuvre avait de bons goûts : les stogges et - surtout - cet album qu'il défendait comme si sa vie en dépendait : Berlin .
C'est grâce à lui que 'ai découvert ce chef d'oeuvre malade .
Il va falloir ue je fouille chez moi et que je retrouve ce vynile ...
Merde ... "The Kid " ...
J'ai la naïveté de croire que Manoeuvre a toujours bon gout (cela ne se perd pas du jour au lendemain, enfin, je crois). Je pense qu'il a beaucoup de pression pour "rajeunir" l'image de son magazine, ce qui le force à se lancer dans des hype ridicules qui plaisent aux ados comme le fait le NME depuis le "renouveau rock". Je me demande quel effet cela a eu sur ses ventes. Personnellement, je lisais ce magazine avec une assiduité remarquable jusqu'il y a un an, quand c'est devenu insupportable.
Reste que ce mois-ci je me suis arrêté devant chez le libraire. Joe Strummer en couverture... Je l'ai pris en main. Après avoir lu "second sex", "the horrors" et "Mes disques à moi : Eric & Ramzy" sur la couverture je l'ai reposé. On croirait à une mauvaise blague.
Pour en revenir à Lou, R&F avait joint il y a quelques années un article sur lui de Lester Bangs fantastique dans un petit livre à part. Je sais pas si ça a fait vendre mais c'était une rudement bonne idée.
Pour le coup, j'étais au concert du PBA le 16/07 et le moins qu'on puisse dire, c'est que Lou a assuré!!!
Berlin a duré près de 1 H 20 (!!!) avec des improvisations touchant au sublime! Alors même que l'annonceur avait annoncé une petite heure...
Trois rappels dont Satellite of love chanté par son bassiste et Walk on the Wild side...
Puis Lou s'en va et... revient nous en jouer une sublime dernière!!!
Près de 2 h 15 de concert!!! Un bonheur...
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